Dans une Algérie où le budget des ménages demeure sensiblement grevé par les dépenses alimentaires, le Professeur Ali Daoudi, éminent enseignant-chercheur à l’École Supérieure d’Agronomie, a sonné la charge pour un meilleur contrôle des prix des denrées agricoles.
Bien que la part budgétaire consacrée à l’alimentation ait reculé de 41% en 2011 à 34% en 2022, selon les statistiques de l’Office National des Statistiques, elle reste substantielle comparée aux pays développés où ce ratio avoisine les 7 à 8%. Le fardeau pesant sur le pouvoir d’achat des Algériens est d’autant plus prégnant que les fluctuations de prix, même modestes, des produits alimentaires induisent des répercussions significatives sur leur capacité de consommation. Une variation de 3 à 5% des coûts des denrées peut considérablement rogner les ressources des ménages, en particulier les plus modestes qui consacrent jusqu’à 40% de leurs revenus à se nourrir.Si les produits de grande consommation sont relativement épargnés par l’inflation grâce à la politique de subventions étatiques, le spectre de la hausse des prix plane sur les produits agricoles tels que les fruits, légumes et viandes. Entre septembre 2023 et septembre 2024, ces denrées ont vu leurs tarifs s’envoler de 4,3%, alerte le Professeur Daoudi, citant les chiffres éloquents de l’ONS.Cette envolée trouve son origine dans les choix stratégiques des agriculteurs qui, selon les anticipations de profits et les coûts de production, privilégient certaines cultures au détriment d’autres filières pourtant essentielles.
La stagnation, voire le déclin, des superficies dédiées aux cultures maraîchères constitue un autre facteur explicatif de cette tendance haussière inquiétante.Selon les données du Ministère de l’Agriculture, l’Algérie ne disposait plus en 2022 que de 90m² de terres irriguées cultivées par citoyen, contre 120m² une décennie auparavant. Une régression alarmante au regard de la croissance démographique galopante que connaît le pays. Pour y remédier, le Pr. Daoudi préconise l’extension des zones cultivées, en particulier dans le Grand Sud, tout en appelant à une profonde mutation structurelle et technologique des modes de production afin de compenser la contraction des superficies par des gains de productivité.
Au-delà de ces mesures indispensables, l’expert juge impératif de mieux cerner les besoins réels de la population par le truchement d’une vaste enquête sur les habitudes de consommation des Algériens. Une démarche essentielle pour orienter judicieusement la production agricole et assurer, à terme, la pérennité de la sécurité alimentaire nationale, socle indéfectible de la stabilité économique et sociale du pays .
Fateh.H.